Retour au potager
Depuis plusieurs semaines je m’interroge… Devrais-je me relancer dans mon potager ?
Cette activité m’a achevé l’année dernière, entre les limaces qui ont dévoré les courgettes, les parasites qui ont noirci mes plants de tomates, mes salades qui n’ont pas montré une feuille et les radis qui ne ressemblaient à rien…
Mais il y avait pire : les railleries des amis et de la famille qui s’amusaient en me voyant lutter ! Et quelle piètre image ai-je laissée à mes enfants qui m’ont prêté main-forte au début de l’aventure, mais qui au vu des premiers résultats, ont préféré me laisser m’obstiner tout seul. Surtout lorsqu’il a fallu que je me débarrasse de centaines de limaces à la tombée de la nuit…
Vous comprenez mon hésitation cette année ! Je me suis interrogé en bon auto-coach et mon subconscient m’a répondu ceci :
Chat échaudé craint l’eau froide !
Comme je ne suis pas un chat, ce dicton ne me concerne pas ! D’ailleurs, je ne comprends même pas qu’on puisse écrire ce genre d’âneries puisque les chats ne savent pas lire. Mais bon… Il y a tellement de gens idiots sur cette planète ! Je ne vais pas m’arrêter à chat… Euh à ça ! Allez Go go go ! Ton subconscient t’as soufflé un truc, alors développe !
Apriori, le chat échaudé a peur de l’eau froide parce que quand on a chaud, l’eau froide est encore plus froide que froide… Je ne comprends pas pourquoi cette citation m’est venue à l’esprit, ça n’a rien à voir avec mon problème !
Je contacte mon auto-coach (c’est à dire moi-même) et je dialogue avec lui. Comme il a un niveau d’intelligence plus élevé que le mien, j’essaye de me mettre à niveau :
– Dis-moi cher auto-coach, je comprends le problème du chat et je compatis, mais je n’ai pas du tout le même problème ! Moi, j’ai été échaudé par mon potager, et je n’ai pas peur de l’eau froide, j’ai peur que ça recommence !
Mon auto-coach me répond :
– Le chat craint l’eau chaude aussi !
– Ce n’est pas du tout ce qui est dit !
– Alors t’as eu raison de me contacter… Je vais t’expliquer : le chat craint l’eau froide, l’eau chaude, et même l’eau tiède !
– Ah non ! On était dans la métaphore ! Alors ne va pas me dire «les chats ont peur de l’eau» pour te débarrasser du problème ! Je veux comprendre le fin-fond de l’histoire !
– C’est bien ce que je suis en train de t’expliquer : le chat a reçu de l’eau chaude et il n’a pas aimé… Si tu arrives avec un seau d’eau froide, il va se sauver ! Toi tu sais que ce n’est pas la même chose, et qu’il pourrait aimer ça. Mais lui, il ne sait pas que c’est de l’eau froide : c’est un chat ! Il voit juste de l’eau et il a peur de vivre la même chose que la première fois…
– C’est vachement recherché !
– Heureux de t’avoir rendu service…
– Mais quel rapport avec moi ?
– Tu ne vois pas ?
– Euh…
– Prends ton temps !
– Donc tu es en train de me dire que cette année, je ne vivrai pas forcément la même chose que l’année dernière, mais que j’ai peur quand-même parce que je m’apprête à faire la même action !
– Voilà ! Chat échaudé craint l’eau froide, croyant qu’il s’agit toujours d’eau chaude…
– Mais mon subconscient ne pouvait pas me dire directement un truc du genre «un an est passé, les choses ont changé entre temps, tu peux réessayer !» ?
– Bein non !
– Pourquoi ?
– Parce que si tu avais compris tout de suite, ç’aurait été moins drôle ! Au moins-là ça t’a inspiré un article rigolo. Ça se peut, il y a des gens qui vont te donner des astuces pour régler tes problèmes de limaces et de parasites divers. C’est un bel échange !
– Mais tu crois qu’ils échangeraient des astuces contre de l’humour ?
– Tu sais, Coluche offrait du rire à son public, et il recevait de l’argent en échange. C’était beaucoup plus difficile, crois-moi !
– Donc selon toi, je devrais retenter l’expérience…
– Oui, la question ne se pose même pas… Sauf si ta peur de la critique ou de la moquerie est plus forte que ton envie de planter et de récolter…
– Euh… Il me paraît évident que les gens qui m’ont mal jugé ont considérablement réduit ma motivation.
– Bien ! Alors tu dois limiter la critique. Je vais te dire ce qui sera critiqué en premier, car dans le cas du potager, c’est évident : il y a des gens qui ne comprendront rien, absolument RIEN à ta démarche, et qui te diront que vu le temps que tu passes à jardiner au lieu de travailler, ton manque à gagner se chiffre en centaines d’euros, et qu’il vaut mieux travailler et acheter de beaux légumes au marché ! Tu as dû en avoir des critiques qui pensaient que tu plantais pour des raisons économiques…
– Oh oui… Au moins 347 !
– Tu te rends compte que tu as parlé de potager à 347 personnes qui ne devraient même pas savoir que tu as un jardin ?!!!
– Tu veux dire que c’est moi qui ai attiré les moqueries ?
– Voilà ! Tu as une partie de ta réponse : ton attitude attire certaines personnes et en fait fuir d’autres. Si tu veux rectifier cette attraction/répulsion, change d’attitude !
– Oui mais par rapport à quoi ? Est-ce que je dois me montrer hautain, distant, communiquer moins… Ca veut dire quoi changer d’attitude ?
– Ne va pas chercher trop loin : change d’attitude par rapport au potager ! L’année dernière, tu as cru que les légumes poussaient tous seuls ! Ton attitude était alignée sur cette croyance, et il te suffisait de parler «potager» pour attirer des personnes qui croyaient comme toi. Donc lorsque tu rencontrais des difficultés, ils se moquaient ou critiquaient parce que tu n’arrivais pas à faire pousser un truc qui pousse tout seul ! Cette année, pars du principe qu’un potager, même si c’est un loisir, nécessite une attention particulière, et que si tu ne défends pas ton bien, des parasites viendront t’en déposséder. Grâce à cette nouvelle attitude, tu attireras des personnes qui croiront comme toi ! Tu auras beaucoup moins de moqueries lorsque tu poseras des pièges à limaces.
– Waouw ! Merci !!! Mais je m’interroge encore : si je me dis que ça va être difficile, ça risque de le devenir ! C’est le principe des croyances…
– Lorsque tu étais jeune, ton père veillait à tes fréquentations…
– Oui…
– Aujourd’hui, tu veilles aux fréquentations de tes enfants !
– Oui !
– Tu as raison ! Les fréquentations, c’est très important, ça peut changer un homme ! L’année dernière, 347 personnes n’ont pas compris la nature de ta démarche : elles t’ont pris pour un gros radin. Cette année, tu peux les éviter, et même les échanger contre des personnes qui te proposeront leur aide. Puisque tu es sensible à la critique, la situation va se simplifier ! Si tu m’avais dit que les limaces sont un plus gros problème que la critique, je t’aurais proposé une autre solution.
– Super ! Donc si j’ai bien compris, je reste dans la même dynamique : je m’autorise à faire des choses simples.
– Exactement ! S’autoriser à faire des choses simples ne signifie pas qu’il faut tout banaliser. L’une des démarches consiste à préparer le terrain pour que les choses soient plus simples à l’avenir. Ainsi, le TOI qui s’engage dans le potager cette année, n’est pas du tout le même TOI que celui de l’année dernière. Pour peu qu’un de tes lecteurs attentionnés te propose de te prêter un hérisson, fini les limaces !
On observe souvent que deux personnes qui s’engagent dans la même action avec les mêmes moyens et les mêmes compétences n’obtiennent pas le même résultat ! Pourquoi ? Parce qu’il y en a une qui est prête à accueillir un hérisson chez elle, alors que l’autre trouve que ça pique !
A++
Stéphane SOLOMON
merci Stéphane, de ta limace rigolote. Je ne sais pas si elles mangent de la graine, alors mets-en dans ton potager à la place du basilic (une petite plante a été dévorée en une nuit chez moi). Car toi, tu nous mets de la bonne graine à l’esprit !
Bonne journée – Lalou
Très drôle, cette métaphore ! L’article n’a pas du tout le même sel si on n’a pas lu l’article précédent..
Comme j’ai tendance à culpabiliser sur tout et sur rien, je me suis tout d’abord prise pour une limace. Mais non, j’aime trop les hérissons : je ne dois pas être une limace.
Je me suis alors demandé ce que peut bien représenter le hérisson dans cette jolie histoire. Peut-être le fameux tétragramme ? Il ne gène finalement que les limaces ….
Bonne journée à tous
Youahou, la qualité de l’article !! Ça boost 🙂
Le parallèle avec le précédent est génial et plein de sens.
Merci !
Cicéron a dit, “si vous possédez une bibliothèque et un jardin alors vous avez tout ce qu’il vous faut”. Je ne sais pas ce qu’il en est de la bibliothèque, mais le jardin se pose plus qu’en une recherche simple d’obtenir une récolte (=performance). Stéphane, je crois que vous êtes le premier à prôner de lâcher le but au profit du chemin. Quand je jardine, le simple fait de bêcher, d’enlever les mauvaises herbes, ou de choisir de les mettre en valeur, de semer, planter, biner, arroser, me reconnecte à la terre, au perpétuel recommencement, aux aléas (les pluies, la grêle, les limaces…), à la vie quoi. Je crois que ce sont les seuls moments où mon esprit est vraiment là, présent et ne divague pas (=tourne en boucle!). Je sais que je peux avoir des fruits et des légumes fantastiques comme rien du tout, mais ce n’est pas ce qui me guide. Je recherche saison après saison mon shoot d’endorphine, comme les coureurs de fond. Ma meilleure façon d’évacuer l’agacement et la colère…je tond la pelouse!
Tout à fait en osmose avec Fanny ! Mon potager était (j’ai vendu ma maison) mon domaine, mon refuge, mon œuvre. C’était le potager “de maman”. Ca donnait plus ou moins mais c’était formidablement “reconnectant” avec moi-même et avec le cosmos -ou l’univers si vous préférez-.
Mes fraisiers donnaient peu mais chaque fraise avait un goût incroyable de satisfaction et de fierté. Mes tomates cerises grimpaient au milieu de l’olivier et le décoraient de jolies petites boules rouges gourmandes que les enfants avaient plaisir à ramasser pour l’apéritif. Mes artichauts ? Les meilleurs du monde….
Mon potager est devenu un vilain terrain vague en friche car les nouveaux occupants sont… trop occupés. Quel dommage pour eux.
Merci, c’est aussi pas mal de reformuler les concepts en utilisant plusieurs exemples différents. Je me rends de plus en plus compte d’à quel point les déceptions passées conditionnent le futur. C’est une réflexion que je vais continuer à approfondir : apprendre de ses erreurs sans lâcher ses objectifs… Merci Stéphane