Histoire d’un Burnout (1/2)
Durant toute son enfance, Bernard a toujours été qualifié de garçon turbulent. Deuxième enfant d’une fratrie de trois, il a donné du fil à retordre à ses parents et à ses enseignants. Nombre de fois, il a été affublé du bonnet d’âne : il préférait courir dans les champs au lieu d’étudier les mathématiques ou le français comme il était attendu qu’il le fasse. Le jour de sa communion, tout de blanc vêtu, sa seule préoccupation était de courir libre comme l’air… au point de revenir tout boueux pour la cérémonie. Quelques années plus tard, délaissant le système éducatif, il privilégiait les sorties entre copains et les nuits à la belle étoile.
Par amour, il est finalement retourné sur les bancs de l’école pour obtenir le diplôme qu’il avait préparé quelques temps auparavant. Alors, il a étudié les mathématiques, entre autres, et a obtenu son CAP de peintre en bâtiment. Par amour toujours, il a décroché un emploi pour exercer son métier. Ce métier lui plaisait ! Méticuleux, respectueux des clients, il mettait un point d’honneur à laisser son chantier dans un état irréprochable chaque soir. Les travaux terminés, il était fier de son œuvre : les peintures étaient belles, sans grains. Les raccords des papiers posés aux murs étaient invisibles. Un vrai travail d’artiste. Il mettait toute son énergie dans chacune de ses réalisations et chaque client vantait ses qualités professionnelles auprès de son employeur.
Pourtant, au fur et à mesure des années, se lever le matin pour être à l’heure à son travail devenait un supplice. En plus, certains chantiers devenaient pesants : parfois, il devait embellir des logements tous identiques avec les mêmes couleurs et mêmes motifs. S’il avait pu choisir, il n’aurait jamais pris ces chantiers ! Pour lui, son métier ne pouvait se résumer à repeindre des murs identiques. Tout lui devint insupportable et il a commencé à s’éteindre, tant dans son travail que dans sa vie personnelle.
Les parents de Bernard étaient tous deux employés. Sa femme également ainsi que tout son entourage. Si le fait d’appartenir à une équipe et si cette vie professionnelle leur convenait à tous, force est de constater que ce n’était pas le cas pour Bernard. Lui, il a besoin de liberté, de bouger pour avancer ! La liberté de choisir ses clients, liberté de choisir ses horaires, liberté de travailler le soir plutôt que le matin, liberté de fixer ses tarifs, liberté de créer, d’innover, de surprendre…
Quand il a été licencié, il a saisi l’opportunité qui se présentait à lui : encouragé et accompagné par sa femme, ils ont tous deux effectué une formation de création d’entreprise. Motivé plus que tout, il a créé son logo, fait de la publicité et il s’est démené sans compter ses heures pour proposer ses services. Le démarrage fut difficile mais ce challenge l’animait ! Il était motivé comme jamais il ne l’avait été.
Ses premiers clients obtenus, il passait des heures à établir des devis qu’il voulait parfaits. D’ailleurs, il maniait les mathématiques de calcul de surface, de calcul de nombre de rouleaux de papier-peint et de seaux de peinture à une vitesse époustouflante. Aucun de ses professeurs de mathématiques n’aurait pu parier sur les capacités de ce petit «cancre», lorsque la motivation guidait son corps comme son esprit.
Il appréciait avant tout le côté créatif de son art : il pouvait enfin proposer ses propres mélanges de couleurs, des teintes uniques ou des combinaisons de motifs de papiers. Il avait l’œil et il savait ce qui allait mettre la pièce dans laquelle il travaillait sous son plus beau jour. Rapidement, le bouche-à-oreille a remplacé la publicité des débuts, au point qu’il devait refuser des chantiers. Ses clients connaissaient ses horaires atypiques et ils l’acceptaient, car quel plaisir pour eux de découvrir leurs biens métamorphosés de la sorte et qui plus est par un homme joyeux et dynamique.
Il y a un complément à cette histoire que vous pouvez lire ici, mais avant, j’ai une question à vous poser ?
Et vous, où en êtes-vous ?
Si vos valeurs morales peuvent être qualifiées de boussole de vie, parce qu’elles vous laissent un sentiment de Justice ou d’injustice face à différents évènements, vos valeurs motrices, elles, motivent et animent vos actions au quotidien : elles sont votre carburant. Votre motivation en dépend, et comme toutes vos autres valeurs, votre parcours de vie peut les faire évoluer. Certaines valeurs qui pouvaient vous animer au début de votre vie ne sont peut-être plus celles qui vous animent principalement aujourd’hui. Il y a plusieurs raisons. Certaines sont plutôt heureuses, d’autres sont terribles, la plus terrible d’entre-elles s’appelle BURNOUT, nous en parlerons dans mon prochain article.
Prendre conscience de vos Valeurs Motrices vous permettra de valoriser votre potentiel : elles vous mettent en mouvement sans même que vous ayez besoin de faire appel à un quelconque effort, et elles vous permettent de vous dépasser tant dans votre vie professionnelle que personnelle.
Isabelle
J’ai eu les larmes aux yeux en lisant cet article. C’est exactement cet état que je recherche. Je l’ai connu pendant mon doctorat, aller travailler était un bonheur, faire des nocturnes ou des week-end pour mes expériences: pas un soucis.
La dernière année de thèse a été difficile , tant sur le boulot que personnellement et depuis je me suis réorienté. Avant ça j’ai passé 1 an et demi sur la question de ces valeurs motrices. Je ne suis pas sûre d’être à ma place dans ce nouveau métier (informatique) mais actuellement en mission pour la fonction publique je me rends compte que je me rapproche de ce qui me plait.
Mais j’ai connu cette phase où je me suis éteinte. Et même si je vois la lumière je ne suis pas encore sortie du tunnel.
J’espère que Bernard ne fera pas un burn out dans le prochain article sinon je risque de prendre peur!
Merci pour cet article Isabelle, je vais me recentrer sur ce qui me fait avancer.
Lecture intéressante, j’ai hate de lire la suite
Merci Tom, la suite arrive 🙂
Je l’ai déjà évoqué par le passé donc ceux qui m’ont lu ne seront pas surpris, mais pour les autres: je viens d’être licencié, pour cause de relocalisation. Le message était “nous gardons le business model mais vous êtes trop chers”. Dans cette phrase, la notion de business model signifie qu’il vont fonctionner de la même façon dans un pays où les gens seront moins payés pour faire le même travail. Cela implique aussi que soit ceux de nos collègues qui sont épargnés soit nous-mêmes devront former nos remplaçants. Ils appellent ça la “transition”. L’accord obtenu pour cette relocalisation stipulait que tous les postes impactés se voient proposer la possibilité d’être eux-mêmes relocalisés. Ce qui signifie que l’employé peut obtenir, sans passer d’entretien, le poste de remplacement aux conditions locales. Ces employés ont également accès à un programme de réassignation prioritaire. Si vous convenez pour un autre job au sein de l’entreprise, vous avez la priorité. Dans ce contexte, on m’a bien posé la question de savoir si je souhaitais me relocaliser, d’abord en Allemagne puis en Slovénie, mais ma réponse n’a pas été prise en compte; le recrutement “extérieur” a commencé “immédiatement”. Quand je l’ai fait remarquer (le poste n’est encore pas pourvu à ce jour) on m’a répondu : “je ne pensais pas que vous seriez intéressé”. Quant au changement de poste, en consultant les propositions, je me posais à chaque fois la question de savoir si je souhaite encore travailler pour cette entreprise dans laquelle je ne me reconnais plus. Ses valeurs ont changé avec l’entrée en fonction du CEO l’année dernière et ce changement me fait douter de la possibilité que mes valeurs soient appréciées, voire même tolérées. J’ai donc choisi de prendre la tangente et de chercher un employeur plus en accord avec moi. (Et vu l’énergumène, ça s’annonce “pas simple”.)
Bonjour Fred,
Avais-tu communiqué sur cette croyance avant de prendre la tangente ?
Quant à l’énergumène, dis lui que je connais un bon coach qui transformerait le “pas simple” en “évidence” 😀
Si par “communiquer sur cette croyance” tu veux dire leur faire part de ce que je pense de la direction qu’ils ont prise, oui, je l’ai fait, à maintenant reprises. C’est probablement une des raisons qui les a menés à ne pas me faire de proposition.
Je pense que nous ne nous sommes pas compris sur la dernière phrase. C’est le fait de trouver un employeur partageant mes valeurs qui n’est pas simple dans notre économie actuelle, pas le besoin d’être en accord avec mes valeurs. Sinon, je ne comprend pas où le coach, si bon soit-il, peut agir. Et quand je dis “pas simple”, je ne dis pas “impossible”. Il se trouve qu’un tel employeur est venu me contacter, sans que je ne le sollicite, mais malheureusement sa proposition n’a pas pu se concrétiser. Nous sommes toujours en contact. Un autre revirement est encore possible.
Si dans ton cas Fred, le coach ne serait d’aucune utilité pour t’aider à être en accord avec tes valeurs (l’intra-personnel) , il a sans aucun doute un rôle à jouer dans la Communication Interpersonnelle. Les Valeurs, ça se partage, ça se fusionne, ça s’imbrique… Il ne suffit pas d’aimer un plat et de le dire, il faut aussi proposer une sauce que l’interlocuteur trouve à son goût.
Ceci-dit, comme le dit Boileau :
«Ce que l’on conçoit bien s’énonce clairement, Et les mots pour le dire arrivent aisément.»
Ce qui signifie que même intérieurement, il y a des choses à éclaircir pour mieux communiquer avec les autres. le coach a donc bien une fonction pour ton discours intérieur. Mais ça, ça se découvre après avoir agi pour les autres…
Mon “pas simple” se referait au fait que j’accepte des valeurs en lesquelles je me reconnaîtrais peu. Pas au fait de “communiquer” les miennes et de les faire accepter par un employeur potentiel.
Boileau a raison, encore faut-il parler la même langue.
Merci Isabelle, intéressant cette notion de valeurs motrices. J’ai hâte de découvrir la suite!
Merci Karine. La suite arrive. Où en êtes vous de vos valeurs ? 🙂
J’ai connu le désintérêt pour le boulot à la fin de ma carrière, suite aux changements que je subissais (les restrictions, ce n’était pas nouveau, mais le flicage si) et à la nouvelle mentalité qui en résultait. Un de mes collègue, par exemple, m’a dédaigneusement répondu qu’il n’était pas baby-sitter lorsque je lui ai montré qu’un étudiant qui n’avait pas obtenu de bourse mais fortement motivé et que j’avais pour cela quand même accepté en thèse avait finalement surmonté une première année laborieuse et brillamment continué – il est prof d’université maintenant. Bref, les multiples coups de canif dans ce que je pensais être ma mission m’ont amenée à un fort désintérêt pour le travail, et j’ai pris ma retraite avec deux ans d’avance (après toutefois 42 ans de service , mais j’aurais eu le « droit » de m’incruster deux ans de plus). Je peux dire que j’ai secoué la poussière de mes chaussures et que je suis partie sans me retourner, avec un grand soulagement. J’ai mis 1an à reprendre des couleurs, j’ai investi dans d’autres activités, j’ai retrouvé le goût de vivre. Je pense que j’allais droit vers le burn-out et que j’ai eu beaucoup de chance de pouvoir financièrement me tirer de là.
Notre ami Bernard a eu beaucoup de courage et la chance d’être soutenu par sa femme. J’attends la suite avec impatience !
S’investir dans des activités dans lesquelles nos valeurs s’expriment permet d’éviter le burnout; alors un grand bravo pour avoir su trouver un moyen de préserver vos valeurs.
Bernard a eu le même courage que vous – il savait que c’était à lui d’agir 😉
Quand on aime on ne compte pas! Et on s’ oublie. J’ai fait la malheureuse expérience d’un burn out sévère…on n’en sort jamais totalement ! Mes valeurs motrices, mon souhait d’avancer et d éclairer mon chemin ne sont pas suffisants. Il n y a pas de miracles: la seule clé : c’est nous! Et nous est un mystère
Je me reconnais très fort dans votre phrase : quand on aime on ne compte pas et on s’oublie…
L essentiel est en nous, comme on le sait on peut réussir à surmonter et se surpasser.
Ce n’est pas toujours évident mais je peux vous assurer que rien n est impossible.
A très bientôt
Mais ?! Et si vous vous aimiez alors ? <3
Comment ça ? Je m’aime puisque je suis la personne la plus importante pour moi. Ensuite il y a toujours des nuages sombres qui nous bousculent.
Après mures réflexions il est en fait certain que je n aime pas ce qui m entoure, l égoïsme, la méchanceté le harcèlement….c est trop pesant pour moi. Je pense que je devrais tirer ma révérence !
Je me demande bien quelles peuvent être mes valeurs motrices…
Bonjour Magalie,
Avez-vous pris le temps de la réflexion ?
Peut-être que j’ai dans mes valeurs motrices créativité autonomie et diversité. Du coup qd du point de vue pro cela pêche d’un côté, je me plonge dans autre chose, pro ou non. Côté perso, je suis moins fortiche.
J’ai hâte de lire la suite. Je ne suis pas sûre d’avoir bien repéré toutes mes valeurs motrices, mais je vais rester vigilante et observer ce qui motive mes actions pour en prendre conscience.
Le mot à la mode est “mindfulness” (pleine conscience, en français). La méditation peut vous aider à observer et identifier vos valeurs.
Bonjour Claudia,
Imaginons que l’argent soit très important pour vous. L’argent n’est pas une valeur, alors, posez-vous la question qu’est ce que ça m’apporte d’avoir de l’argent ?
Cela pourra être, par exemple, la liberté ou bien la sécurité.
La manière dont nous vivons une valeur au quotidien dépend de nos critères personnels. La sécurité sera financière (une somme d’argent sur un compte bancaire, par exemple) pour une personne quand elle sera liée au fait d’être propriétaire de son logement pour une autre personne.
Je pense avoir identifié mes valeurs motrices : que les autres fassent appel à moi et je me lève comme un seul homme prête immédiatement à soulever des montagnes
mais en poussant ma réflexion je me rends compte qu’en absence de cette demande,je suis malheureuse et j’impose mon aide qui est plus ou moins bien accepté voire rejetée, ce qui me déroute à chaque fois et pourtant cette aventure malheureuse m’est déjà arrivé plusieurs fois
Comment gérer lorsque la valeur motrice est absente et qu’on se lève sans réelle motivation ?
Développez votre empathie.
Mon problème est que je suis trop empathique au contraire mais peut-être d’une “mauvaise” façon
Êtes-vous sûre de ne pas confondre altruisme et empathie?
Bonjour Pascale,
Si votre aide est mal acceptée ou rejetée, c’est peut-être car cette aide imposée touche une valeur chez l’autre.
Dans la plupart des conflits, les valeurs sont en arrière-plan.
Quelle valeur a été heurtée chez cette personne qui rejette mon aide ?
Comment peut on faire pour que nous nous entendions en prenant soin de nos valeurs respectives ?
Pour la motivation, une question : qu’est ce qui me fait vibrer, au point que j’en perde toute notion d’effort, de temps,…?
merci Isabelle pour ces conseils précieux
j’ai un petit sujet de réflexion pour les vacances
Cet article met en évidence à quel point je suis encore pommee, je n’ais toujours pas identifié les valeurs motrices alors que j’ai rompu mon contrat il y a maintenant 2 ans à cause de cette divergence de valeur justement…
Un petit atelier à proposer pour aider ?
Bonjour Lise,
Cette Newsletter n’est pas faite pour que les gens se rendent compte qu’ils sont encore plus paumés qu’avant la lecture ;-).
Connaissant ton humour et ta propension à utiliser des formules abaissantes dès que tu parles de toi, je comprends ce que tu veux dire au fond. Mais je vais quand-même te proposer de tenter des formules plus positives. Même si au départ, tu penses «je suis encore plus paumée qu’avant», tu peux l’écrire, te relire et y déceler l’intention principale, puis barrer les formules dévalorisantes au profit d’une réécriture.
Par exemple (et ce n’est qu’un exemple), voici une reformulation de ce que tu as écrit :
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Cet article est très évocateur pour moi. J’ai rompu mon contrat il y a 2 ans parce que mes valeurs n’étaient pas alignées sur celles de mes dirigeants, et je ne me sentais pas à ma place. Mais si je sais ce que je ne veux pas, je ne sais pas encore ce que je veux vraiment, et je viens de comprendre qu’un travail sur mes valeur motrices m’aidera.
Un petit atelier signé Isabelle et Stéphane sera le bienvenu.
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Cet effort de (re)formulation aura un double effet. Tout d’abord, la prochaine fois qu’Isabelle ou moi écrirons un article, nous ne nous dirons pas pendant l’écriture :
– Et si ce paragraphe était de trop ? Lise risque de se sentir encore paumée… Et ne faisons surtout pas d’atelier, ça va l’achever !
Ce qui va produire l’effet inverse de ce que ton intention initiale : nous informer que si nous organisons, nous avons déjà ta souscription.
Les commentaires sont pour nous d’une grande Valeur ! Nous tenons compte du ressenti de chacun. C’est TRES IMPORTANT pour nous.
Ceci-dit, nous avons des techniques pour aller de l’avant, donc c’est plutôt TON bénéfice qu’il faut voir dans cet un effort de reformulation. Et même si tu n’es pas convaincue que le choix des mots et des expressions peut avoir un impact fort sur l’éveil de tes Valeurs, essaie quand-même ! Ce sera un excellent préambule à notre atelier.
A++
Stéphane