Une histoire de proactivité

 En 1995, je venais de déposer le bilan après une liquidation judicaire. En tant que gérant toutes les responsabilités m’incombaient. Or, pour moi, je n’étais nullement responsable : mon associé avait ruiné l’entreprise, il m’a même escroqué personnellement avant disparaître.
 
Je pensais que j’allais pouvoir plaider ma cause dans ce «Palais de Justice». Je pensais naïvement, que les juges m’autoriseraient à raconter mon histoire. Mais ils n’étaient pas là pour juger un abus de confiance. La séance concernait l’avenir de l’entreprise. Ils m’ont à peine laissé le temps de m’exprimer avant de confier les clés au liquidateur, ne me laissant pour seul destin, que mon visage entre mes mains…
 
La traversée du désert fut rude : ma situation ne me permettait plus de disposer d’un domicile fixe, ni d’un compte bancaire. J’ai vécu le rejet, l’exclusion, les saisies judiciaires et autres humiliations. Après des années de confort et d’autonomie, j’ai dû retourner chez mes parents. Je logeais en alternance chez eux, chez des amis, mes frères et sœurs et les parents de Karine (ma petite amie qui est aujourd’hui ma compagne). Deux années d’errance dont le salut dépendait de la capacité d’accueil de mes proches, avec le sentiment de toujours déranger quelqu’un… Chaque «déménagement» dévalorisait l’image que j’avais de moi et provoquait un profond chagrin.
 
Jugé coupable par la Justice personnifiée, je ne trouvais pas la force de me regarder en face. Je ne trouvais de l’apaisement que dans la poésie, la musique, et la lecture de livres sur le Développement Personnel : Gutenberg a rendu l’espérance du pauvre possible. Des gens qui étaient passés par la même situation que moi, voire pire, s’en sont sortis et me donnaient des conseils en lettres d’imprimerie : Napoleon Hill, Dale Carnegie, Christian Godefroy, Louis L. Hay, Mark Fisher, Tom Hopkins…
 

La Proactivité

J’y ai découvert la Proactivité, cette ATTITUDE qu’il convient d’adopter lorsqu’on a tendance à s’apitoyer, se culpabiliser et blâmer les autres… Sans en prendre conscience tout de suite, j’ai fait grandir cette aptitude qui permet de développer son sens des Responsabilités, afin de reprendre sa place dans le monde des vivants.
 
Beaucoup de mes proches ne comprenaient pas comment, dans ma situation, je pouvais dépenser le peu d’argent que j’avais dans des livres tels que «Le secret des millionnaires», «Partez gagnant» ou encore, «S’affirmer et communiquer». J’avais à peine de quoi acheter mon insuline, puisqu’à l’époque la CMU n’existait pas encore et comme je n’avais pas pu payer la caisse d’Assurance Maladie, je n’étais plus assuré social.
 
2 ans après mon dépôt de bilan, j’accusais encore mon associé d’être la cause de mes tourments. Et puis un jour, l’évidence me sauta aux yeux : personne ne m’avait obligé à choisir cet associé-là. Il y a même des gens qui ont tenté de m’en dissuader. Je l’ai vu agir de façon malhonnête envers d’autres, dès qu’ils avaient le dos tourné. Pour quelles raisons m’aurait-il épargné ? Tous les signes avant-coureurs d’une trahison étaient clairement visibles et je me suis pourtant engagé avec lui.
 
Beaucoup de gens me disent que cette révélation soudaine aurait dû m’amener vers davantage de culpabilité, mais visiblement j’étais prêt à la transformer en Responsabilité : mes lectures m’ont préparé à ça ! J’ai fait une erreur en choisissant un mauvais associé, et tous les livres que j’avais lu me donnaient droit à l’erreur… Mon estime a rejailli instantanément. Toutes mes valeurs, ces bouchons de liège que je maintenais en immersion, se sont libérées, et ont refait surface en s’autorisant un bond hors de l’eau au préalable…
 
C’est étrange comme phénomène, car ma situation sociale et financière, cette situation dite «réelle», n’avait pas changé. Mais dans mon monde intérieur, la culpabilité avait disparu. Soudain, ce Tribunal m’est apparu sous un angle nouveau : une aide du monde extérieur, venant mettre fin à une erreur de parcours. Le juge a tranché le lien qui existait entre moi et mon malfaiteur. Il a fait ce que je n’aurais su faire tout seul à l’époque : me libérer ! Comment ai-je pu percevoir cette sentence comme une punition ?
 
En pratique je m’étais auto-puni, car je n’étais pas interdit de gérance, je le CROYAIS ! Je CROYAIS également que j’étais interdit de banque, mais une fois que j’ai repris ma vie en mains, 3 lettres ont suffi pour que je puisse choisir la banque que je veux. Quant à l’Assurance Maladie, au moment où j’ai contacté la caisse des indépendants pour établir un plan de remboursement, j’ai appris que mon dossier avait été classé depuis 18 mois… Là encore, je CROYAIS que je n’avais aucun droit… Ce sont toutes ces CROYANCES qui m’ont construit une vie limitée, pas la réalité. Je m’étais imaginé toutes ces punitions, car dans mon esprit j’étais punissable ! Dès que j’ai compris que ce jugement avait été prononcé pour me libérer, la graine entrepreneuriale a germé de nouveau.
 
En pratique, il m’a fallu deux ans de plus pour retrouver une situation sociale stable, car j’avais beaucoup de dettes… Mais les progrès que je faisais chaque jour me démontraient que le Bonheur se trouve déjà sur le chemin qui y mène.
 
Etape par étape, je reconstruisais ma vie, constatant que chacune des victoires qui jalonnaient mon parcours, était une victoire sur moi-même.
 
La Proactivité est un cadeau qui se trouve en toi. Le paquet cadeau et l’emballage ne sont pas spécialement attirants, en tout cas bien moins attirants que d’autres comme la jalousie, l’orgueil, la colère ou le complotisme … Mais une fois le paquet ouvert, tu mérites !
 
A++
Stéphane SOLOMON
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