La matrice d’Eisenhower

Pour l’histoire : Dwight David Eisenhower (1890 – 1969) fut le 34ème président des Etats-Unis. Il cumula 2 mandats à partir de 1953. Ses antécédents militaires sont remarquables : c’est à lui qui commanda les opérations du débarquement du 6 juin 1944. Il fut apprécié pour son calme, sa finesse, son sens des valeurs, sa foi en l’avenir… En tant que Président, il valida de nombreux projets, comme la création de la NASA, pour ne citer qu’un exemple.

Parmi les documents décisionnels qu’il utilisait, on remarque un outil baptisé « la matrice d’Eisenhower », dont voici une représentation :

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Eisenhower considérait qu’une action devait être qualifiée par deux attributs : l’URGENCE d’une part, et l’IMPORTANCE d’autre part. Son analyse permet de donner deux dimensions à la prise de décision. De plus, c’est un diagramme facile à tracer à la main «sur un coin de table».

L’intérêt de cette simplification est énorme:

  • Lorsque les choses à faire se multiplient, nous avons tendance à nous occuper uniquement de ce qui est urgent. Or toute chose importante devient urgente à un moment donné (puis caduque). Le fait de lister les importances et de les reconnaître, permet d’anticiper les futures urgences. C’est énorme ! Peu de gens s’autorisent à le faire.
  • La prise de décision est souvent soumise à des dizaines de critères. Est-ce économique, rentable, écologique, juste, équitable, motivant… ? A force d’évaluer les choses en approfondissant les valeurs et les croyances, on finit par passer plus de temps en philosophie humaniste qu’en actions. Or un humaniste qui n’agit pas, c’est un comble ! Le fait de se demander si une chose est simplement IMPORTANTE (pour soi), nous ramène vers notre mission, et permet d’éviter l’analyse excessive (qui se termine, de toute façon, par une action tourmentée).
  • Reconnaître que dans les idées qui traversent notre esprit, il y a une certaine proportion de choses qui ne sont ni urgentes, ni importantes, c’est énorme ! Selon notre état interne, ça peut nous amuser, nous agacer, nous éveiller… En pratique, ces idées sont une source de créativité. Ecrites telles qu’elles, elles sont inutiles, et nous feraient perdre un temps précieux.  Mais que deviendraient-elles lorsque notre imagination décidera de les cuisiner ?
  • L’observer sous différents angles, en tournant la feuille, ou en s’intéressant aux zones denses (les cases où il y a le plus d’items), est une source d’interprétations révélatrices. Par exemple, si vous parvenez à remplir la case A (Urgent et Important), alors que la case B (Important, mais non Urgent) reste désespérément vide, cela signifie que vous manquez d’objectifs à long terme. Inscrivez-vous à OBJECTIFS-COACH ! Si vous ne parvenez pas à remplir les cases C et D,cela signifie que vous ne savez pas déléguer. Il va falloir agir, car il s’agit d’une compétence essentielle.
  • Cette matrice est multi-fonction. Vous pouvez vous en servir pour qualifier les tâches de la journée ou de la semaine, mais vous pouvez également en faire un outil d’analyse spécifique à un projet précis. Par exemple, vous pouvez avoir une matrice d’Eisenhower réservée au projet «acheter une maison». Vous y reporterez toutes les tâches qui vous traversent l’esprit, et qui ne concernent que ce projet-là. Ainsi, vous pourriez avoir un classeur qui contient des dizaines de matrices d’Eisenhower : autant que vous avez de projets…
  • Lorsque vous disposez d’un outil stimulant qui donne des résultat, vous avez envie de l’utiliser (de jouer avec) ! C’est une source de motivation. Au début l’outil est acquis pour un but précis. Mais au bout d’un moment, son utilisation devient un but. Ce qui donne lieu à de nombreuses idées créatives.

Bref… La matrice d’Eisenhower n’est pas juste un rectangle divisé en 4 cases. C’est un outil qui vous aide à mieux vous connaître, et à ce titre, il est très motivant.

Revoyons rapidement les deux qualificatifs :

Tâche URGENTE

Doit être exécutée le plus vite possible. Ne peut attendre, car après l’échéance, elle deviendrait caduque. De cette action dépendent beaucoup d’autres, ou des décisions capitales. L’erreur classique est de considérer que tout est urgent ! Par exemple, certaines personnes règlent leur messagerie électronique, afin que tout message en partance soit automatiquement marqué comme urgent. Ce pré-paramétrage leur nuit bien plus qu’il ne leur sert : c’est l’histoire du garçon qui criait au loup…

Autorisez-vous des tâches non urgentes ! C’est capital pour votre système de gestion de temps. Relativisez, recadrez les choses dans le contexte. Donnez du SENS à vos actions en réévaluant leur urgence.

IMPORTANT

J’ai déjà évoqué le concept de l’IMPORTANCE hier en proposant un outil : LE SYSTEME D’IMPORTANCE, basé sur un questionnement. VOS valeurs, VOS croyances, VOS aspirations, VOS acquis, VOS espoirs, VOTRE entourage… créent VOS importances. Sinon, tout est important.

Au travail, le système d’importance peut être créé selon le même processus, en changeant de référentiel. L’entreprise a des projets, des objectifs, une charte, une culture, une histoire, une déontologie (des valeurs !)… Et vous, vous avez un rôle dans cette entreprise ! La fonction que vous occupez correspond à des compétences acquises ou à acquérir, qui vous permettent d’entreprendre tout ce qui est IMPORTANT pour l’entreprise. Votre système d’importance est basé sur ce binôme : Entreprise / Votre fonction. Ce binôme est votre référentiel. En créant un SYSTEME D’IMPORTANCE spécifique à votre travail, vous devrez vous placer dans ce contexte, tout en vous rappelant que votre travail contribue à votre Développement Personnel.

Pour être pleinement efficace au travail, il convient d’être cohérent avec votre fonction. Beaucoup de salariés fraichement embauchés oublient cette cohérence pendant leur période d’intégration (période d’essai). Ils ont tendance à “faire leur travail” comme ils l’ont toujours fait. Or ce qu’on attend d’eux, ce sont des actions IMPORTANTES pour l’entreprise, et cette entreprise est forcément différente de la précédente. Inversement, beaucoup d’employeurs ou de managers ne précisent pas ce qui est important pour l’entreprise. Ils embauchent, et misent sur la capacité d’adaptation de l’employé. La plupart des conflits hiérarchiques et des licenciements sont issus de cette notion d’IMPORTANCE. Elle est à définir, car la prise de décision au quotidien dépend d’elle.

Mode d’emploi de la matrice d’Eisenhower pour planifier votre semaine

Prenez votre carte hebdomadaire(celle qui contient des tâches éparpillées de façon artistique), choisissez une tâche et posez-vous la question :

Est-elle urgente ?

Si oui, la tâche a sa place dans la colonne de droite (zone A ou C), sinon elle prendra place dans la colonne de gauche (zone B ou D).

Est-elle importante ?

(pensez à votre système d’importance basé sur votre référentiel, car sinon, ce mot en veut rien dire !)

Si oui, la tâche a sa place dans la partie haute (zone B ou A), sinon elle prendra place dans la partie basse (zone D ou C).

En vous posant deux questions indépendantes, vous disposerez facilement vos tâches dans les 4 cases prévues dans la matrice.

Actions à entreprendre une fois vos tâches classées :

Chacune de ces 4 cases mérite un traitement particulier.

Case A (UI) : A faire de suite, vous-même. C’est votre TODO-List du jour. La matrice d’Eisenhower peut donc vous aider à choisir vos tâches du jour. C’est un outil qui affine celui que vous connaissez déjà.
Case B (uI) : Prendre le temps de planifier sur les jours à venir (voire à reporter sur d’autres semaines). Déléguer si possible.
Case C (Ui) : A transmettre à la hiérarchie, ou à déléguer le plus rapidement possible. A faire soi-même, si peu coûteux (en temps, en argent, en efforts).
Case D (ui) : Oublier au plus vite ou transmettre à quelqu’un d’autre. C’et soit une tâche qui ne vous concerne pas. Soit une source d’inspiration lorsque vous feuilletterez votre classeur de matrices d’Eisenhower.

Chaque jour, vous pourrez établir une nouvelle matrice, car la case A sera à nouveau disponible (ou elle contiendra des tâches reportées de la veille). D’autres tâches seront déplacées (si le degré d’urgence à changé par exemple).

Voici 2 interprétations de votre gestion du temps actuelle, selon la quantité d’informations qui se trouvent dans les 4 cases :

  • Situation de crise : Beaucoup de tâches dans les cases A et C, et peu de tâches dans la case B
  • Situation idéale (sereine et prometteuse) : Beaucoup de tâches dans la case B et peu de tâches les cases A et C

Aspirez à la seconde situation. C’est votre solution ! Comment pourriez-vous faire pour y arriver ?

D’autres regards

Il y a en réalité 9 regards possibles sur cette matrice :

  • L’intégralité de la page représente l’ensemble des choses à faire
  • La partie droite représente ce qui est à faire au plus vite
  • La partie gauche, ce qui peut attendre
  • La partie haute, tout ce qu’il vous appartient d’exécuter ou d’analyser, car c’est important POUR VOUS
  • La partie basse, tout ce qui peut être délégué, car même si c’est à faire dans l’absolu, ça ne vous apportera rien
  • + les 4 cases précédemment énumérées (UI, uI, Ui et ui)

Conclusion

De nombreuses personnes considèrent la matrice d’Eisenhower comme obsolète ou inutilisable au quotidien. On dit parfois qu’elle fait perdre du temps ! La raison principale est due au fait que ces personnes n’ont pas assimilé la notion d’IMPORTANCE. Ils confondent souvent Urgent et Important.

C’est pour cette raison que votre système d’importance doit être clair. D’ailleurs, si vous avez du mal à utiliser cette matrice (au delà de la période d’initiation), c’est un signe : il faut redéfinir votre système d’importance en vous posant les bonnes questions (voir l’article précédent)

Ainsi, même à ce niveau, la matrice d’Eisenhower représente un nouvel intérêt : Lorsque la colonne de gauche perd de sa densité, c’et un indicateur qui vous signale que votre système d’importance mérite une petite “mise-à-jour”.

La matrice d’Eisenhower ne remplace pas la TODO-List, elle l’affine :

  • La carte hebdomadaire est votre source énergétique. C’est un processus libre, créatif et nécessaire périodiquement
  • La matrice d’Eisenhower organise les tâches et les idées, en proposant un mode opératoire pour chaque type de tâche. Elle met également en évidence ce qui devrait être délégué (car sans importance pour vous).
  • La zone A est votre TODO-List “chaude” : aujourd’hui (demain si vous n’avez pas terminé).

Enfin, même si cette matrice permet de gérer ses semaines ou ses journées, rappelez-vous que vous pouvez créer des matrices spécifiques à des projets précis (dont la faisabilité dépasse le cadre de la semaine). Il m’arrive parfois de tracer cette matrice dans un coin de table au restaurant, en parlant avec un client ou un partenaire. Ca donne des idées, et ça nourrit la discussion.

Que ce soit en solo ou en groupe, l’utilisation de cet outil vous permettra d’aller de découverte en découverte.

A++

Stéphane SOLOMON

Une réflexion au sujet de « La matrice d’Eisenhower »

  1. Bonjour Stéphane,

    Je trouve cette notion importance/urgence très intéressante.
    J’ai quand même un peu de mal à intégrer tous ces bouts de papier : la feuille hebdo, la feuille quotidienne, la matrice générale, les matrices par projet. Difficile d’avoir tout ça sous les yeux.
    Sur un plan très pratique : j’ai dans mon agenda des rendez vous (plus ou moins importants, plus ou moins urgents) que je ne peux généralement pas déplacer. J’ai aussi des réunions fixes. Quand tu dis qu’il faut extraire de la liste hebdo 7 tâches maxi par jour, que fais tu de ces rendez vous ? Une journée où les rendez vous ou les réunions programmées s’enchaînent laisse évidemment moins de temps pour de nouvelles tâches. Autrement dit, comment gérer dans les différentes listes les tâches qui impliquent d’autres personnes ?
    Merci de ta réponse,
    Florence

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